Il faut être attentif à tous les termes d'un sujet.
Même un petit mot (un article, …) peut avoir de l'importance.
Une expérience de pensée est une situation concrète (issue d'un livre, d'un film, de l'histoire ou de son imagination) dans laquelle il y a un choix à faire.
On peut construire un raisonnement à partir d'une expérience de pensée : on décrit l'expérience, puis on explique les raisons qui justifient le choix que l'on ferait.
Simone
de Beauvoir
John
Stuart Mill
vs.
Première partie
Le féminisme est un mouvement de justice sociale qui lutte contre les oppressions et les situations de domination spécifiquement subies par les femmes
« On ne sait trop ce que le mot bonheur signifie et encore moins quelles valeurs authentiques il recouvre ; il n’y a aucune possibilité de mesurer le bonheur d’autrui et il est toujours facile de déclarer heureuse la situation qu’on veut lui imposer »
Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe, I, Introduction
Ce qui est critiqué ici, c'est un ensemble d'usages sociaux et politiques du bonheur.
Les préférences adaptatives désignent la tendance à se résigner à son sort et à adapter ses désirs et ses ambitions au contexte dans lequel on vit
« C’est donc une notion à laquelle nous ne nous référerons pas. […] Comment dans la condition féminine peut s’accomplir un être humain ? Quelles voies lui sont ouvertes ? Lesquelles aboutissent à des impasses ? Comment retrouver l’indépendance au sein de la dépendance ? Quelles circonstances limitent la liberté de la femme et peut-elle les dépasser ? Ce sont là les questions fondamentales que nous voudrions élucider. C’est dire que nous intéressant aux chances de l’individu nous ne définirons pas ces chances en termes de bonheur, mais en termes de liberté. »
Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe, I, Introduction
Deuxième partie
« Peu de créatures humaines accepteraient d'être changées en animaux inférieurs sur la promesse de la plus large ration de plaisirs de bêtes ; aucun être humain intelligent ne consentirait à être un imbécile […], aucun homme ayant du cœur […] à être égoïste et vil »
John Stuart Mill, L'utilitarisme
Une vie avec plus de plaisirs n'est pas nécessairement une vie meilleure, car ce qui compte ce n'est pas la quantité des plaisirs (en nombre, en intensité, en durée), mais la qualité.
La vie bonne n'est pas une simple somme de plaisirs, mais repose sur certaines valeurs : une vie proprement humaine, la réflexion, la conscience morale
L'épisode des Lotophages dans l'Odyssée
« Nous pouvons donner de cette répugnance le nom qu'il nous plaira [...] mais si on veut l'appeler de son vrai nom, c'est un sens de la dignité que tous les êtres humains possèdent, sous une forme ou sous une autre, et qui correspond – de façon nullement rigoureuse d'ailleurs – au développement de leurs facultés supérieures. »
John Stuart Mill, L'utilitarisme
La vie bonne repose sur l'exercice et le développement de nos facultés :
La vie bonne est une vie accomplie : le bien suprême, c'est le perfectionnement de soi
Cela n'implique pas un modèle déterminé que chacun devrait suivre. Il y a au contraire une valorisation de l'individualité, de la recherche de soi.
« Quiconque suppose que cette préférence est un sacrifice du bonheur, que l’être supérieur, dans des circonstances identiques, n’est pas plus heureux que l’être inférieur, confond deux idées très différentes, l’idée de bonheur et l’idée de satisfaction. »
John Stuart Mill, L'utilitarisme
Le bonheur n'est pas l'idéal d'une vie pleine de satisfactions.
Le bonheur est l'idéal d'une vie accomplie, pleine de sens, riche et profonde.
En ce sens, le bonheur inclut les autres valeurs importantes : la liberté, la justice, la vérité, …
« Il vaut mieux être un homme insatisfait qu'un porc satisfait »
John Stuart Mill, L'utilitarisme
Textes : https://docs.google.com/presentation/d/1wzsd4qpdOzgx7kR-WoUVf5-SerCetPMH4Ob0QXW6cro/edit?usp=sharing
La figure de la femme au foyer épanouie dans une publicité Moulinex, heureuse de recevoir un ustensile de cuisine, masque ce que subissent les femmes : les inégalités dans le travail domestique, la double journée de travail, la charge mentale
Martha Nussbaum à propos des préférences adaptatives http://home.sandiego.edu/~baber/research/adaptivepreference.pdf Cas de : Jayamma : "[C]onsider Jayamma… acquiescent in a discriminatory wage structure and a discriminatory system of family income sharing. When women were paid less for heavier work at the brick kiln and denied chances for promotion, Jayamma didn’t complain or protest. She knew that this was how things were and would be…she didn’t even waste mental energy getting upset, since these things couldn’t be changed" Cas de : Vasanti : "Vasanti stayed for years in an abusive marriage…Like many women, she seems to have thought that abuse was painful and bad, but, still, a part of women’s lot…The idea that it was a violation of rights…and that she herself had rights that were being violated by his conduct -- she did not have these ideas at that time, and many, many women all over the world still do not have them. My Universalist approach seems to entail that there is something wrong with the preference (if this is what we should call it) to put up with abuse" Cas de : Saida : "Like the others, Saida, 27, received no formal education...Saida says her eldest daughter Nahid, 12, is getting ready for her betrothal to a 26-year-old farmer and does not have much time to spare for morning instruction… Saida teaches her girls the really important things--how to cook, sew and soothe a husband's ego. "Teaching my daughters how to make their husbands comfortable is the most important thing," she says, "because if a husband is not comfortable, then the woman's life is hell." Critiques : https://www.erudit.org/en/journals/philoso/2020-v47-n1-philoso05372/1070254ar/ https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/bitstream/handle/1866/18792/Lemay_Marie-Pier_2016_memoire_.pdf?sequence=2&isAllowed=y#:~:text=Dans%20cette%20litt%C3%A9rature%20philosophique%2C%20une,forg%C3%A9e%20dans%20des%20conditions%20injustes.
Ce qui est le plus important, ce n'est pas le bonheur, c'est la liberté et l'égalité réelle des chances
Approfondissement possible : distinction Mill / Bentham Contrairement à Bentham qui ne prend en compte que la quantité des plaisirs (“Si l’on fait abstraction des préjugés, le jeu d’osselets est d’une valeur égale à celle des arts et sciences que sont la musique et la poésie”), Mill pense qu'il y a une hiérarchie des plaisirs : tous n'ont pas la même qualité, Questions sur cette hiérarchisation de modes de vie : peut-on vraiment distinguer des plaisirs supérieurs (nobles) et des plaisirs inférieurs (bas) ? Cela ne conduit-il pas à adopter une forme de paternalisme ?
Approfondissement possible : Perfectionnisme moderne (idéal de développement de son individualité : pas une seule forme possible d'excellence) ≠ perfectionnisme ancien (un idéal universel d'excellence)
Refaire le lien avec la question posée : Ce qui est le bien suprême ce n'est pas de vivre une vie pleine de satisfactions, c'est de vivre une vie accomplie et pleine de sens Il ne peut donc y avoir de véritable bonheur sans : liberté, vérité, justice … La recherche du bonheur n'est pas une simple recherche de satisfactions égoïstes Approfondissement : cf. texte de Singer
Citation à retenir
Le bonheur se trouve-t-il dans le plaisir ? Le bonheur est-il le bien suprême ? Le bonheur a-t-il un prix ? Le désir est-il la marque de notre imperfection ? Sommes-nous condamnés à la souffrance ? Une vie heureuse n’est-elle qu’une succession de plaisirs ? Le bonheur consiste-t-il à ne plus rien désirer ? Le bonheur peut-il se trouver dans le travail ? Le bonheur doit-il quelque chose à la chance ? Peut-on être heureux dans la solitude ? La recherche du bonheur est-elle une quête égoïste ?