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« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
I – Lecture globale
« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
Notions importantes :
existence de l'être humain
essence de l'être humain (ce qu'il est), définition, concept
se rencontrer, surgir dans le monde, s'engager, choisir, dessiner sa figure
n'être rien
angoisse, anxiété, pensée inquiétante
responsabilité
mauvaise foi
action, projet, se réaliser, actes, sa vie, entreprises
amour
art
subjectivité
vérité, connaissance
l'autre, les autres
l'intersubjectivité
Thème
L'essence de l'être humain
B. Formuler la question et la thèse du texte
« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
Question directrice :
Qu'est-ce qui constitue l'essence d'un être humain ?
Mais la question n'est pas de savoir ce qui fait l'essence d'un être humain en général, mais de déterminer ce qui définit un être humain en particulier.
Plus précisément, la question est la suivante : qu'est-ce qui définit ce que je suis ?
Thèse :
Ce que je suis n'est pas défini à l'avance, c'est, à travers mon existence, par mes choix, par mes actes que je me définis
C. Repérer et formuler le plan du texte
« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
I
II
III
IV
« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
I
II
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IV
« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
I
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« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. […] L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. […] La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. […] Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
I
II
III
IV
I – Sartre définit ce qui fait l'essence d'un être humain : mon essence (ce que je suis) n'est pas définie à l'avance : je suis ce que je fais de moi
II – Sartre dégage une conséquence du fait d'avoir à choisir ce que je suis: la responsabilité d'avoir à définir ce que je suis est source d'angoisse
III – Sartre précise que les choix qui définissent mon identité sont ceux que je réalise véritablement : c'est avant tout par mes actes que je me définis
IV – Sartre souligne que les choix qui me définissent ne sont pas simplement des choix individuels : c'est aussi à travers les autres que je me définis, et à travers moi que les autres se définissent
II – Lecture fine
« [I]l y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et […] cet être c'est l'homme […]. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. »
Jean-Paul Sartre , L'existentialisme est un humanisme
Partie I :
Pour l'être humain, “l'existence précède l'essence”
Cela veut dire que : l'être humain “se définit après” et qu'il “n'est d'abord rien” et qu' “il sera tel qu'il se sera fait”
« L'existentialiste déclare volontiers que l'homme est angoisse. Cela signifie ceci : l'homme qui s'engage et qui se rend compte qu'il est […] celui qu'il choisit d'être […] ne saurait échapper au sentiment de sa totale et profonde responsabilité. Certes, beaucoup de gens ne sont pas anxieux ; mais nous prétendons qu'ils se masquent leur angoisse, qu'ils la fuient […]. [O]n n'échappe à cette pensée inquiétante que par une sorte de mauvaise foi. »
Jean-Paul Sartre , L'existentialisme est un humanisme
Partie II :
Nous ne pouvons pas échapper à cette “profonde responsabilité” d'avoir à choisir qui nous sommes : “l'homme est angoisse”
Nous cherchons souvent à “masquer” cette angoisse et nous sommes alors de “mauvaise foi”
« La doctrine que je vous présente […] déclare : il n'y a de réalité que dans l'action ; elle va plus loin d'ailleurs, puisqu'elle ajoute : l'homme n'est rien d'autre que son projet, il n'existe que dans la mesure où il se réalise, il n'est donc rien d'autre que l'ensemble de ses actes, rien d'autre que sa vie. […] [I]l n'y a pas d'amour autre que celui qui se construit […] ; il n'y a pas de génie autre que celui qui s'exprime dans des œuvres d'art : le génie de Proust c'est la totalité des œuvres de Proust. […] Un homme s'engage dans sa vie, dessine sa figure, et en dehors de cette figure il n'y a rien. […] Ce que nous voulons dire, c'est qu'un homme n'est rien d'autre qu'une série d'entreprises, qu'il est la somme, l'organisation, l'ensemble des relations qui constituent ces entreprises. »
Jean-Paul Sartre , L'existentialisme est un humanisme
Partie III :
L'être humain n'est “rien d'autre que l'ensemble de ses actes”, “rien d'autre qu'une série d'entreprises”
Deux exemples : l'amour et l'art
« Mais la subjectivité que nous atteignons là […] n'est pas une subjectivité rigoureusement individuelle […]. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l'autre. L'autre est indispensable à mon existence, aussi bien d'ailleurs qu'à la connaissance que j'ai de moi. […] Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons l'intersubjectivité, et c'est dans ce monde que l'homme décide ce qu'il est et ce que sont les autres. »
Jean-Paul Sartre , L'existentialisme est un humanisme
Partie IV :
La connaissance de soi repose sur Autrui
Mon existence même repose sur Autrui
Je me définis à travers les autres, et les autres aussi se définissent à travers moi
B. Compréhension précise de chaque passage
Point méthode
[RAPPEL] Même si la connaissance de l'auteur n'est pas requise, des connaissances sont utiles pour mieux comprendre le texte.
1) La distinction essence / existence
Définition
L'essence : du latin esse (verbe être)
Désigne l'être d'une chose, ce qu'est cette chose, ce qui la définit
On distingue ainsi : l'essence (les propriétés fondamentales sans lesquelles la chose ne peut pas être ce qu'elle est) et les “accidents” (les propriétés secondaires, non-essentielles, sans lesquelles la chose peut malgré tout être ce qu'elle est)
Ici : on s'intéresse à l'essence d'un être humain en particulier, c'est-à-dire à la question suivante : « Qu'est-ce qui me définit ? »
Certains aspects de nous-mêmes semblent secondaires, non-essentielles (p.ex. : avoir de la barbe aujourd'hui…), mais y a-t-il des des propriétés fondamentales qui caractérisent notre identité ?
« Le caractère de l'homme est invariable : il reste le même pendant toute la durée de sa vie. Sous l'enveloppe changeante des années, des circonstances où il se trouve, même de ses connaissances et de ses opinions, demeure, comme l'écrevisse sous son écaille, l'homme identique et individuel, absolument immuable et toujours le même. […] L'homme même ne change jamais : comme il a agi dans un cas, il agira encore, si les mêmes circonstances se présentent […]. »
Schopenhauer , Essai sur le libre arbitre
Schopenhauer défend une conception essentialiste et fixiste de l'identité (“On ne change pas …” ) : nous sommes définis par notre caractère.
⇒ une forme de fatalité : nous ne pouvons pas choisir qui nous sommes, nous héritons d'un caractère.
De manière plus générale, nous avons parfois tendance à essentialiser les autres.
Qu'est-ce que cela veut dire ?
Définition
L'essentialisation est le processus consistant à réduire une personne ou un groupe à une identité présupposée, fondée sur des stéréotypes ou des préjugés.
Sartre s'oppose à l'essentialisme et à toute essentialisation et défend au contraire une conception existentialiste de l'identité.
« L'existence précède l'essence »
Dans le cas des objets techniques, c'est l'inverse :
L'essence
précède
l'existence
= la définition de l'objet, les fonctionnalités prévues, le cahier des charges, les plans, le prototype
= la réalisation concrète de l'objet
la conception d'un modèle
la production
⇒ “La conception précède la confection”
Dans le cas des êtres humains, l'existence précède l'essence.
= nous ne sommes pas produits d'après un modèle qui était préalablement conçu.
⇒ Pas de fatalité, mais au contraire une liberté fondamentale dans la définition de notre identité.
Sartre s'oppose non seulement à l'essentialisme, mais aussi au déterminisme.
Non seulement il n'y a pas d'essence préalable qui me définit, mais je ne suis pas non plus défini par des facteurs extérieurs.
Chaque être humain se définit, librement, à travers son existence.
2) L'angoisse et la mauvaise foi
La responsabilité d'avoir à choisir qui je suis est source d'angoisse.
L'angoisse se distingue de la peur et de la crainte.
La peur : une réaction à une menace précise ou à un danger imminent.
La crainte : une préoccupation face à certains événements qui risquent d'arriver dans le futur.
L'angoisse : sans objet précis. Ce qui nous angoisse, c'est la conscience de notre propre liberté.
Il faut faire un choix, mais il n'y a pas de chemin déjà tracé : nous faisons l'expérience d'un vide de repères intérieurs.
Pour ne pas avoir à ressentir cette angoisse, nous avons tendance à être de mauvaise foi.
Qu'est-ce que la mauvaise foi ?
Sens ordinaire : = soutenir qu'on a raison alors qu'on sait pertinemment qu'on a tort.
Sens sartrien : refuser sa liberté, alors qu'on sait qu'on est libre
Exemple du garçon de café.
Être de mauvaise foi, c'est se donner un être, une consistance
(refuser le vide de l'angoisse existentielle)
Le garçon de café incarne son rôle sans distance critique : il est défini par son rôle
3) L'être humain comme projet
Ce qui me définit, ce n'est pas ce que j'aimerais être, ce que je crois être. C'est ce que je fais réellement dans le monde.
Il peut y avoir un écart entre ce que je crois être et ce que je suis ⇒ illusion possible sur soi.
Exemple de l'amour : l'amour n'est pas un simple sentiment intérieur. La réalité de l'amour, ce sont des actes d'amour.
“Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour” (Pierre Reverdy)
Exemple de l'art : ce qui fait qu'une personne est artiste, ce sont ses œuvres.
L'identité n'est pas à chercher en soi, mais dans le monde. Sartre critique l'idée qu'on pourrait comprendre qui on est par simple introspection. L'être humain se définit “sur la route”.
Exemples : Le bildungsroman , les road movies (p.ex. : La vie rêvée de Walter Mitty
4) Autrui comme condition de soi
Autrui est condition de la connaissance de soi : Sartre souligne l'importance du regard d'Autrui.
Ambivalence : ce regard est à la fois ce qui permet une conscience authentique de soi , mais aussi ce qui peut conduire à la mauvaise foi et à figer l'individu dans une identité subie.
Autrui est aussi condition de mon existence. Sartre souligne l'importance de la reconnaissance de soi par autrui.
Idée développée par les théories de la reconnaissance, notamment par Axel Honneth.
Exemple : L'essence d'un triangle est d'être une figure géométrique avec trois côtés.
Autrement dit : avoir trois côté fait partie de l'essence d'un triangle.
Être de couleur rouge ne fait pas partie de l'essence d'un triangle
Sartre s'intéresse ici non pas à l'essence d'un être humain en général (propriétés fondamentales qui permettent de caractériser l'espèce humaine (ou le genre humain)), mais à l'essence d'un être humain en particulier (propr. fondamen. qui permettent de définir qui je suis, c'est-à-dire mon identité personnelle)
La question est donc la suivante : Y a-t-il des propriétés fondamentales qui permettent de définir qui je suis ?
le caractère : des traits stables qui caractérisent notre personnalité.
Essentialisation : / sexisme, racisme
(stéréotypes sexistes, racistes)
/ autres cultures
Lien avec l'ethnocentrisme
L'homme n'est d'abord rien : Le "rien" dont parle Sartre est l'absence d'une essence prédéfinie ou d'une nature fixe chez l'homme.
ex - istence : être jeté dans le monde
"l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait."
- Comparaison avec Beauvoir : “on ne naît pas femme, on le devient”
- cf. Eribon, Retour à Reims
Ajouter exemples :
peur des serpents
crainte de l'échec à un examen
Peur, crainte : pas forcément justifiées ; il peut y avoir des peurs ou des craintes imaginaires
Distinction : sentiment de peur / disposition à ressentir ce sentiment de peur
Exemples : peur du vide, crise d'angoisse, angoisse du passage à l'adolescence ...
L'angoisse est existentielle
Angoisse / vide
/ sa propre liberté : la liberté est angoissante
Un vide de repères intérieurs.
Il faut faire un choix, mais il n'y a pas de chemin déjà tracé.
Se donner un être, une consistance
(refuser le vide de l'angoisse existentielle)
Le garçon de café incarne son rôle sans distance critique : il est défini par son rôle
Autre exemple : rôle de pouvoir, "c'est la loi" (croire qu'on n'exerce pas un jugement), se réfugier derrière un rôle, une position sociale, un statut
Notion de chosification
Sens ordinaire : "Indécence caractérisée par une volonté d'affirmer un propos que l'on sait foncièrement faux ou injustifié"
"Couramment, on dit de mauvaise foi celui qui, par amour-propre ou par intérêt, s'obstine contre toute évidence à soutenir qu'il a raison, alors qu'il sait pertinemment qu'il a tort. Sourd à l'argumentation rationnelle, il échafaude de fausses bonnes raisons, s'enfermant dans un système de défense absurde."
http://pierre.campion2.free.fr/mornej_sartre.htm
Exemple du garçon de café
refuser sa liberté, tentative d'échapper à la responsabilité de soi
face à angoisse du néant, se donner un certain être
chosification de soi-même réconfortante
(pour soi / en soi)
Chercher à se masquer à soi-même sa liberté
L'être humain est projet
et non "a des projets"
Projet // projection, projectile
L'être humain est projeté, lancé dans le monde, en mouvement et défini par la manière dont il se réalise par ses actes
actes ≠ paroles, croyances, velléités, rêves
Ce qui me définit, ce n'est pas ce que j'aimerais être, ce que je crois être
rapport au monde / ce que je fais dans le monde
Illusion possible : je crois être ceci / mais que suis-je réellement ?
Exemple : croire être féministe, se dire féministe
Amour : des actes d'attention, de care
On peut aussi découvrir qu'on est amoureux ; la conscience de l'amour peut venir après la réalité des actes d'amour.
Exemple de l'artiste : Notre vie // une œuvre d'art.
Se croire artiste
Angoisse fondamentale : on ne peut pas d'abord chercher à se connaître, puis faire des choix en fonction de qui on est.
C'est le contraire : on doit choisir, et on est défini par nos choix.
roman d'apprentissage
voyage
https://www.erudit.org/fr/revues/cine/2008-v18-n2-3-cine2294/018415ar/
https://stringfixer.com/fr/Road_movie
road movies + "recherche de soi"
Retour / angoisse : c'est en agissant qu'on va définir ce qu'on est, on ne peut pas d'abord chercher à savoir qui on est, puis agir
male gaze
autrui est « le médiateur indispensable entre moi et moi-même ».
http://iphilo.fr/2016/12/03/jeanpaul-sartre-conscience-de-soi-et-conscience-dautrui-daniel-guillon-legeay/#:~:text=Autrui%20est%20l'%C3%AAtre%20par,plan%20moral%2C%20intellectuel%20et%20spirituel.
Soi personnel et soi collectif : les sources d’un malentendu
https://journals.openedition.org/teth/523
Identité constituante, identité constituée
https://journals.openedition.org/teth/615
Honneth / théories de la reconnaissance / affirmation de son existence
- enfant : famille / reconnaissance affective /
- adulte :
- citoyen, sujet de droit / reconnaissance politique /
- individu / reconnaissance sociale /
https://journals.openedition.org/ethiquepublique/1796
https://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?id=lyon2.2008.sey-buhrig_am&part=155805