Q2 – Nos choix sont-ils
déterminés par des
facteurs que nous ne
maîtrisons pas ?

Cédric Eyssette (2022-2023)
https://eyssette.github.io/

L'expérience de Asch

L'expérience de Milgram

Schéma de l'expérience de Milgram

Photographie de la machine utilisée pour envoyer les chocs électriques

Les variantes de l'expérience de Milgram

I – L'argument
des influences
inconscientes

Première partie

« Partie subordonnée d’un grand tout, l’homme est forcé d’en éprouver les influences. […] Les erreurs des philosophes sur la liberté de l’homme, viennent de ce qu’ils ont regardé sa volonté comme le premier mobile de ses actions, & que, faute de remonter plus haut, ils n’ont point vu les causes multipliées & compliquées indépendantes de lui qui mettent cette volonté elle-même en mouvement […]. Cependant il faut avouer que la multiplicité & la diversité des causes qui agissent sur nous souvent à notre insu, font qu’il nous est impossible, ou du moins très difficile, de remonter aux vrais principes de nos actions […]. Voilà ce qui rend l’étude de l’homme […] si difficile »

D'Holbach, Système de la nature, chap. XI

Quels sont les facteurs qui peuvent exercer
une influence inconsciente sur nous ?

  1. Des facteurs biologiques ?
    • = une question trop complexe, trop technique pour être traitée ici
  2. Des facteurs psychiques ?
  3. Des facteurs sociaux ?

A. Les facteurs
psychiques

1) L'hypothèse de
l'inconscient freudien

« Dans le cours des siècles, la science a infligé à l’égoïsme naïf de l’humanité deux graves démentis. La première fois, ce fut lorsqu’elle a montré que la terre, loin d’être le centre de l’univers, ne forme qu’une parcelle insignifiante du système cosmique dont nous pouvons à peine nous représenter la grandeur [...]. Le second démenti fut infligé à l’humanité par la recherche biologique, lorsqu’elle a réduit à rien les prétentions de l’homme à une place privilégiée dans l’ordre de la création, en établissant sa descendance du règne animal [...]. Un troisième démenti sera infligé à la mégalomanie humaine par la recherche psychologique de nos jours qui se propose de montrer au moi qu’il n’est seulement pas maître dans sa propre maison, qu’il en est réduit à se contenter de renseignements rares et fragmentaires sur ce qui se passe, en dehors de sa conscience, dans sa vie psychique. »

Freud, Introduction à la psychanalyse (1916), II, chap. 18

Freud prétend inscrire la psychologie dans l'histoire des grandes découvertes scientifiques

Physique Copernic La Terre n'est pas le centre du monde
Biologie Darwin L'être humain n'est pas le centre de la vie sur Terre
Psychologie Freud ! ……………… n'est pas
le centre de ………………

La conscience

l'esprit humain

« Le moi n'est pas maître dans sa propre maison »

Freud

Le moi conscient ne représente que la surface de la vie psychique.

Il faut explorer les profondeurs de l'esprit humain : il y a en nous un inconscient psychique qui constitue l'essentiel de ce que nous sommes

a/ L'inconscient selon Freud

  1. Des motifs psychiques inconscients
>
Le Moi la salle de conférence = les fonctions conscientes
(agir, parler, réfléchir …)
Le Ça les personnes dehors
qui veulent rentrer
dans la salle
= les pulsions inconscientes
(pulsions sexuelles
et agressives)
Le Surmoi un gardien qui
contrôle l'entrée
= le refoulement des pulsions
qui ne correspondent pas
aux normes sociales et à un idéal du moi que nous avons intériorisés
  1. Une structuration psychique inconsciente, qui s'est constituée pendant l'enfance

b/ Arguments et objections

Argument 1

On ne peut certes pas observer directement l'inconscient, mais on peut l'observer indirectement, car l'inconscient se manifeste par certains effets observables :

  1. Des manifestations ordinaires : dans le rêve, les lapsus, le corps …
  2. Des manifestations pathologiques : dans les troubles psychiques.

Un exemple : le rituel du coucher d'une jeune fille.

Objection contre l'argument 1 : il ne s'agit pas d'une observation, mais d'une interprétation et on pourrait faire, de manière arbitraire, une psychanalyse sauvage de n'importe quel comportement.

Argument 2 & objections : On peut distinguer les interprétations arbitraires et les interprétations justifiées. Pour qu'une interprétation soit justifiée, il faut qu'elle respecte certains critères.

Critère
de la
source
Le patient lui-même doit être la source de l'interprétation Objection : Il est possible que l'interprétation soit en fait
suggérée par l'analyste
Critère
de la
cohérence
L'interprétation doit être cohérente et apporter de la cohérence en donnant une explication à des phénomènes qui semblent incohérents Objections :
1) La cohérence ne suffit
pas à établir la vérité
2) Il y a d'autres
explications possibles
Critère du succès thérapeutique La compréhension par
le patient du sens de
ses symptômes doit lui
permettre de s'en libérer
Objections :
1) Les effets thérapeutiques de la psychanalyse sont remis en cause

2) L'effet thérapeutique pourrait n'être qu'un effet placebo (ou un effet Dodo)

c/ Bilan sur l'inconscient freudien

Les hypothèses spécifiques de Freud sont remises en causes, mais la psychologie contemporaine conserve généralement certaines idées :

  1. l'importance de la verbalisation du vécu ;
  2. l'importance de l'intersubjectivité ;
  3. l'importance de l'enfance.

2) L'hypothèse de
l'inconscient cognitif

Définition

Un biais cognitif est une tendance à penser ou raisonner en fonction d'un schéma automatique.

L'effet de leurre (Decoy effect)

Decoy Effect

Le biais de statu quo

Deux procédures différentes pour le don d'organes

Définition

Un nudge désigne une manière d'influencer les comportements qui ne fait appel ni à la violence (exercice direct de la force physique) ni à la contrainte (interdiction et menace de sanctions) mais repose sur la connaissance de la psychologie humaine.

B. Les facteurs
sociaux

Antoine Gallien, Baisemains et mocassins (2005)

Dans le film L'esquive, d'Abdelattif Kechiche, Un groupe d'adolescents d'une cité HLM répète, pour leur cours de français, un passage de la pièce Le Jeu de l'amour et du hasard de Marivaux.

« Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c’est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience. »

Karl Marx, Contribution à la critique de l’économie politique, préface

II – 
Les limites de
cet argument

Deuxième partie

« [D]epuis que les sciences positives de la nature se sont constituées […], que de changements n'avons-nous pas introduits dans l'univers ! Il en sera de même dans le règne social. […] [C]'est la sociologie qui, en découvrant les lois de la réalité sociale, nous permettra de diriger avec plus de réflexion que par le passé l'évolution historique ; car nous ne pouvons changer la nature, morale ou physique, qu'en nous conformant à ses lois. […] Les sciences, en même temps qu'elles proclament la nécessité des choses, nous mettent entre les mains les moyens de la dominer. »

Émile Durkheim, Sociologie et sciences sociales

Idée directrice

Les hypothèses déterministes dans les sciences humaines ne conduisent pas au fatalisme.

  • Qu'est-ce que le fatalisme ?

L'histoire d'Œdipe

Définition

Le fatalisme suppose l'existence d'un destin face auquel nous sommes impuissants.
C'est l'idée que de toute façon, ce qui doit arriver arrivera, quoi que l'on fasse.

Définition

Le déterminisme, c'est l'idée qu'on peut expliquer un phénomène par les facteurs qui sont la cause de ce phénomène.

L'idée ici c'est que, grâce aux sciences humaines, nous pouvons agir sur les facteurs (biologiques, psychiques, sociaux) qui peuvent exercer une influence sur nous.

Nous ne sommes pas impuissants : la connaissance des déterminismes nous permet de maîtriser en partie ces facteurs.

Mise en
pratique

Exercice d'application

  • Choisir un sujet ci-dessous :
    • Le libre arbitre est-il une illusion ?
    • Un être humain est-il responsable de tout ce qu'il fait ?
    • L’idée d’une liberté totale a-t-elle un sens ?
    • Sommes-nous déterminés par notre passé ?
    • Les humains sont-ils des êtres à part dans la nature ?
    • L'explication scientifique de l'être humain est-elle incompatible avec l'affirmation de la liberté humaine ?
    • L'idée d'inconscient remet-elle en cause la liberté ?
    • La conscience est-elle ce qui me rend libre ?
  • Rédiger une sous-partie de dissertation (autour de 300 mots)
    ⚠️  il faut défendre une seule réponse, mobiliser le cours, et utiliser le modèle ARES

https://www.youtube.com/watch?v=QOZRim9SKm8

Faire rapprochement avec “Le jeu de la mort”

Faire un rappel sur l'empathie, le cours sur les morales du sentiment, l'idée de mise à distance d'autrui, la question de la “banalité du mal”

Faire noter : "Partie subordonnée d’un grand tout, l’homme est forcé d’en éprouver les influences." L'être humain n'est pas un être à part, il existe dans une situation, un contexte. Il faut expliquer le comportement des êtres humains par des causes. Ces causes sont : multiples, complexes, et agissent "à notre insu" (de manière inconsciente). Une simple réflexion par soi-même sur l'être humain ne suffit pas : il faut parvenir à étudier l'être humain, en tant qu'objet d'une connaissance scientifique.

Présenter autrement : mettre directement titre partie A. Simplifier le titre "A. Les facteurs …" faire partie A sur les facteurs biologiques Les facteurs biologiques envisageables : les gènes, les hormones, les neurones Cas examiné : les gènes Partir de ce que les élèves connaissent de la génétique La génétique des comportements quelques modèles animaux Les limites : 1) la complexité psychologique, sociale humaine => pas de transposition possible d'une espèce animale à l'être humain 2) la complexité génétique : on ne peut pas associer un comportement à l'expression mécanique d'un gène Reste la question de l'influence de certains facteurs génétiques (sans identification précise, et sans fatalisme) sur l'augmentation de la probabilité d'apparition de certaines caractéristiques. Attention aux raccourcis, aux simplifications. Prudence requise.

La Terre n'est pas le centre du monde : Passage d'un univers fini avec un centre (la Terre : géocentrisme) à un univers infini, sans centre L'être humain n'est pas le centre de la vie sur Terre : dépassement des anciennes classifications du vivant (hiérarchisation avec l'être humain au sommet) ; cf. le buisson du vivant au Musée des Confluences https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/Img492-2015-04-06.xml

Le moi conscient ne représente que la surface de la vie psychique. Il faut explorer les profondeurs de l'esprit humain : Nous ne sommes pas transparents à nous-mêmes : il faut explorer les profondeurs de l'esprit humain pour nous comprendre. L'essentiel de notre vie psychique

à partir de 10'54

Un site très bien fait pour explorer les différents biais cognitifs : https://www.shortcogs.com/ Une infographie qui cherche à faire une liste de tous les biais cognitifs : https://www.penser-critique.be/wp-content/uploads/2018/02/codex-biais-cognitifs.pdf Deux articles de l'_Encyclopédie Philosophique_ sur les biais cognitifs : [version grand public](https://encyclo-philo.fr/s/encyclophilo/item/54) et [version académique](https://encyclo-philo.fr/s/encyclophilo/item/165)

déterminisme au sens "faible" ≠ déterminisme au sens fort : Q3 si je la fais, sur l'absence de possibilités alternatives / un seul futur possible. Argument du démon de Laplace La connaissance des déterminismes, ici, désigne la connaissance des facteurs qui influencent les choix des êtres humains

Donner un exemple