Q1a –
L'État n'est-il
qu'un moyen
de domination ?

Cédric Eyssette (2022-2023)
https://eyssette.github.io/

I –
Les institutions politiques ont
pour finalité le développement
des êtres humains

Première partie

« L'être humain est un animal politique »

Aristote, Politiques, III, 6

La nature de l'être humain est sociale : il y a une tendance inscrite en nous qui nous conduit à désirer vivre avec les autres.

L'être humain n'est pas un être sauvage qui cherche la solitude ou le conflit.

La cité n'est pas une simple association économique en vue de la satisfaction des besoins matériels.

La communauté politique est ce qui permet à l'être humain de se réaliser.

Elle permet une existence proprement humaine fondée sur l'amitié, l'engagement citoyen, la réflexion en vue du bien commun.

« La cité est une communauté d'hommes libres »

Aristote, Politiques, III, 6

La politique n'est pas une affaire d'experts. Elle n'est pas réservée à certains. Elle est l'affaire de tous.

  1. Chacun est capable à égalité de discuter et de juger du bien commun.
  2. Une décision prise à plusieurs est meilleure qu'une décision prise tout seul. La discussion démocratique permet l'émergence d'une forme d'intelligence collective.
  1. la liberté n'a de sens que dans le contexte d'une communauté politique à laquelle on participe et dans laquelle on a un pouvoir de décision.

⇒ En ce sens, la politique n'est pas un moyen de domination, mais une forme d'émancipation et de réalisation de soi en tant qu'être humain.

II –
L'État peut devenir
un simple moyen
de domination

Deuxième partie

A. Approche historique :
Max Weber

Il faut distinguer la cité-État antique et l'État moderne.

« L'État moderne est un groupement de domination de caractère institutionnel qui a cherché (avec succès) à monopoliser, dans les limites d'un territoire, la violence physique légitime comme moyen de domination et qui, dans ce but, a réuni dans les mains des dirigeants les moyens matériels de gestion. Ce qui veut dire qu'il en a exproprié tous [ceux qui] en disposaient autrefois de leur propre droit et qu'il s'est substitué à eux, même au sommet de la hiérarchie. »

Max Weber, Le Savant et le Politique, 1919, trad. Freund, « 10/18 », 1963, p. 132-134

  • L'Etat moderne est le résultat d'un processus historique d'accumulation et de centralisation de pouvoirs auparavant dispersés. Peu à peu, L'Etat monopolise plusieurs pouvoirs (pouvoir fiscal, militaire, judiciaire, légal...)
  • Il s'impose progressivement comme dominant et affirme la souveraineté de son pouvoir, à travers :
    1. l'extension et la protection de son territoire ;
    2. une organisation centralisée qui repose sur la création d'institutions et d'administrations ;
    3. la lutte contre les autres formes de pouvoirs, notamment le pouvoir religieux ;
    4. l'unification linguistique et culturelle de la population.

Exemple : le passage de la féodalité
à la monarchie en France

B. Approche économique
et sociale :
le marxisme

1/ Les fondements du marxisme

Première idée : le déterminisme économique

  • Les phénomènes humains s'expliquent essentiellement par des facteurs économiques.
  • C'est une forme de matérialisme : pour comprendre les humains, il faut se focaliser sur les conditions matérielles d'existence, les moyens matériels par lesquels les êtres humains existent, agissent, pensent.

Deuxième idée : les classes sociales

  • Le facteur le plus important réside dans la structuration de la société en classes sociales.
  • Il y a une classe dominante qui possède des moyens économiques, et une classe dominée, qui ne possède que sa force de travail.

Troisième idée : la lutte des classes

  • La classe dominante lutte pour conserver et prolonger sa position de domination.
  • La classe dominée a intérêt à s'opposer à la domination qu'elle subit.

2/ Qu'est-ce que l'État
d'après le marxisme ?

Première idée : l'Etat comme prolongement de la lutte des classes

  • Le pouvoir politique de l'Etat sert à maintenir et renforcer la domination économique de la classe sociale dominante.

« [L]'État n'est au fond que le reflet […] des besoins économiques de la classe qui domine la production »

Friedrich Engels, Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande

La notion d'idéologie

  • L'État est, dans les faits, au service d'une classe sociale particulière (la classe dominante), mais il se présente, idéologiquement, comme étant au service de tous.
  • L'idéologie désigne ici un ensemble d'idées, de représentations qui visent à rendre légitime une pratique ou une situation en masquant la réalité des rapports de domination

La critique des apparences démocratiques

  • La démocratie se présente comme au service du peuple, mais l'est-elle vraiment ? (cf. infographie, document)
  • Le vote est-il le reflet des pensées des individus ?

« [L]es pensées de la classe dominante sont aussi, à toutes les époques, les pensées dominantes […] [car] la classe qui dispose des moyens de la production matérielle dispose, du même coup, des moyens de la production intellectuelle. »

Marx et Engels, L'Idéologie allemande

3/ Que faut-il faire d'après le marxisme ?

Première idée : la lutte pour une société sans domination

  • Le but idéal d'un point de vue marxiste serait de parvenir à une société sans domination et par conséquent sans classes sociales. Mais, un tel changement ne peut arriver sans une lutte. La classe dominante fait et fera tout son possible pour empêcher cette révolution.

Deuxième idée : la dictature du prolétariat

  • La classe dominée doit donc d'après le marxisme s'emparer du pouvoir de l'État pour lutter contre la classe dominante (c'est ce qu'on appelle la phase de “dictature du prolétariat”) et mettre en place progressivement une société sans domination.

Problèmes

  • Si les dominés s'emparent du pouvoir, ne vont-ils pas tout simplement devenir de nouveaux dominants ?
  • Les dominés n'ont-ils pas malgré tout intérêt à ce qu'existe un État capable de les protéger ?