Q1 –
Le pouvoir politique
n'est-il qu'un moyen
de domination ?

Cédric Eyssette (2023-2024)
https://eyssette.github.io/

I –
Le pouvoir politique
est idéalement au service
du développement
des êtres humains

Première partie

« L'être humain est un animal politique »

Aristote, Politiques, III, 6

La nature de l'être humain est sociale : il y a une tendance inscrite en nous qui nous conduit à désirer vivre avec les autres.

L'être humain n'est pas un être sauvage qui cherche la solitude ou le conflit.

La cité n'est pas une simple association économique en vue de la satisfaction des besoins matériels.

La communauté politique est ce qui permet à l'être humain de se réaliser.

Elle permet une existence proprement humaine fondée sur l'amitié, l'engagement citoyen, la réflexion en vue du bien commun.

« La cité est une communauté d'hommes libres »

Aristote, Politiques, III, 6

La politique n'est pas une affaire d'experts. Elle n'est pas réservée à certains. Elle est l'affaire de tous.

  1. Chacun est capable à égalité de discuter et de juger du bien commun.
  2. Une décision prise à plusieurs est meilleure qu'une décision prise tout seul. La discussion démocratique permet l'émergence d'une forme d'intelligence collective.
  1. la liberté n'a de sens que dans le contexte d'une communauté politique à laquelle on participe et dans laquelle on a un pouvoir de décision.

⇒ En ce sens, la politique n'est pas un moyen de domination, mais une forme d'émancipation et de réalisation de soi en tant qu'être humain.

II –
L'État peut devenir
un simple moyen
de domination

Deuxième partie

A. Approche historique

Il faut distinguer la cité-État antique et l'État moderne.

« L'État moderne est un groupement de domination de caractère institutionnel qui a cherché (avec succès) à monopoliser, dans les limites d'un territoire, la violence physique légitime comme moyen de domination et qui, dans ce but, a réuni dans les mains des dirigeants les moyens matériels de gestion. Ce qui veut dire qu'il en a exproprié tous [ceux qui] en disposaient autrefois de leur propre droit et qu'il s'est substitué à eux, même au sommet de la hiérarchie. »

Max Weber, Le Savant et le Politique, 1919, trad. Freund, « 10/18 », 1963, p. 132-134

  • L'Etat moderne est le résultat d'un processus historique d'accumulation et de centralisation de pouvoirs auparavant dispersés. Peu à peu, L'Etat monopolise plusieurs pouvoirs (pouvoir fiscal, militaire, judiciaire, légal...)
  • Il s'impose progressivement comme dominant et affirme la souveraineté de son pouvoir, à travers :
    1. l'extension et la protection de son territoire ;
    2. une organisation centralisée qui repose sur la création d'institutions et d'administrations ;
    3. la lutte contre les autres formes de pouvoirs, notamment le pouvoir religieux ;
    4. l'unification linguistique et culturelle de la population.

Exemple : le passage de la féodalité
à la monarchie en France

B. Approche
économique et sociale

→   le marxisme

1/ Les fondements du marxisme

Première idée : le déterminisme économique

  • Les phénomènes humains s'expliquent essentiellement par des facteurs économiques.
  • C'est une forme de matérialisme : pour comprendre les humains, il faut se focaliser sur les conditions matérielles d'existence.

Deuxième idée : la lutte des classes

  • La société est divisée en classes sociales distinctes : une classe dominante qui possède des moyens économiques, et une classe dominée, qui ne possède que sa force de travail.
  • La classe dominante lutte pour conserver et prolonger sa position de domination. La classe dominée a intérêt à s'opposer à la domination qu'elle subit.

2/ Qu'est-ce que l'État
d'après le marxisme ?

Première idée : l'Etat comme prolongement de la lutte des classes

  • Le pouvoir politique de l'Etat sert à maintenir et renforcer la domination économique de la classe sociale dominante.

« [L]'État n'est au fond que le reflet […] des besoins économiques de la classe qui domine la production »

Friedrich Engels, Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande

La notion d'idéologie

  • L'État est, dans les faits, au service d'une classe sociale particulière (la classe dominante), mais il se présente, idéologiquement, comme étant au service de tous.
  • L'idéologie désigne ici un ensemble d'idées, de représentations qui visent à rendre légitime une pratique ou une situation en masquant la réalité des rapports de domination

La critique des apparences démocratiques

La démocratie se présente comme un pouvoir par le peuple pour le peuple, mais l'est-elle vraiment ? 🔗 🔗

La démocratie se fonde sur l'idée que chacun peut voter selon ses idées et que chaque voix compte pour un (one man, one vote), mais est-ce si simple ?

« [L]es pensées de la classe dominante sont aussi, à toutes les époques, les pensées dominantes […] [car] la classe qui dispose des moyens de la production matérielle dispose, du même coup, des moyens de la production intellectuelle. »

Marx et Engels, L'Idéologie allemande

3/ Que faut-il faire d'après le marxisme ?

Première idée : la lutte pour une société sans domination

  • Le marxisme défend une position révolutionnaire et non pas réformiste.
  • Mais la classe dominante a pour intérêt d'empêcher cette révolution.

Deuxième idée : la dictature du prolétariat

  • La classe dominée doit s'emparer du pouvoir de l'État.
  • Ce n'est censé être qu'une phase temporaire afin de mettre en place progressivement une société sans domination.

Problèmes

  • Dans quelle mesure la violence politique est-elle légitime ?
  • Si les dominés s'emparent du pouvoir, ne vont-ils pas tout simplement devenir de nouveaux dominants ?
  • Les dominés n'ont-ils pas malgré tout intérêt à ce qu'existe un État capable de les protéger ?

= Une approche du pouvoir qui se veut **réaliste** et non pas idéaliste

= les moyens matériels par lesquels les êtres humains existent, agissent, pensent.

on ne pourra pas simplement convaincre les dominants qu'ils doivent arrêter de dominer croyance aux pouvoirs de l'argumentation, de la parole : naïveté politique