III – Pour savoir ce qui est bien et ce qui est mal, il faut réfléchir aux conséquences et aux principes de nos choix

Troisième partie

L'histoire du cochon Esther (Esther the Wonder Pig)

Photographie du cochon Esther

Schéma sur les deux formes de morale de la raison

A. Les morales des conséquences

1/ Une forme classique de morale des conséquences : l'utilitarisme de Bentham

« Additionnez toutes les valeurs de l'ensemble des plaisirs d'un côté, et celles de l'ensemble des peines de l'autre. Si la balance penche du côté du plaisir, elle indiquera la bonne tendance générale de l'acte, du point de vue des intérêts de telle personne individuelle ; si elle penche du côté de la peine, elle indiquera la mauvaise tendance générale de l'acte. Tenez compte du nombre de personnes dont les intérêts semblent en jeu ; et réitérez le procédé précédent pour chacune d'entre elles. Additionnez les nombres qui expriment les degrés de la bonne tendance qu'un acte possède du point de vue de chaque individu pour lequel sa tendance est globalement bonne ; recommencez à propos de chaque individu pour lequel sa tendance globale est mauvaise. Faites le bilan ; si la balance penche du côté du plaisir, elle indiquera la bonne tendance générale de l'acte, compte tenu du nombre total ou de la communauté des individus concernés ; si elle penche du côté de la peine, elle indiquera la mauvaise tendance générale de l'acte, compte tenu de cette même communauté. »

Bentham, Introduction aux principes de la morale et de la législation, chap. IV

Schéma sur l'utilitarisme

2/ Les exemples

La défense des politiques de réduction des risques liés aux drogues

Photographie d'une distribox de seringues à Lyon

La défense de l'homoparentalité

Photographie d'un couple lesbien avec deux enfants

La défense d'un devoir de donner de l'argent à des associations humanitaires efficaces

La critique de la production industrielle de viande

Photographie de l'entassement de poulets industriels

Exercice d'argumentation et de mobilisation de sa culture

  • Choisir un sujet et rédiger l'équivalent d'une sous-partie (250-350 mots), de préférence avec le modèle ARES :
    Attention : il faut développer une seule réponse avec un seul argument, et mobiliser ses connaissances (concept, référence, exemple) sur les morales des conséquences et l'utilitarisme de Bentham
    • La conscience morale n’est-elle que le résultat de l’éducation ?
    • Faut-il se fier à ses sentiments pour agir moralement ?
    • Avons-nous des devoirs envers les animaux ?
    • La morale peut-elle se passer d’un fondement religieux ?
    • En morale, y a-t-il des certitudes ?
    • Le progrès technique peut-il conduire à de nouveaux problèmes moraux ?

B. Les morales des principes

Schéma des deux formes de morale des principes

Schéma sur la philosophie morale de Kant

1/ Kant : agir moralement, c'est agir d'après un impératif catégorique

« Les impératifs hypothétiques représentent la nécessité pratique d'une action possible, considérée comme moyen d'arriver à quelque autre chose que l'on veut (ou du moins qu'il est possible qu'on veuille). […] [S]i l'action n'est bonne que comme moyen pour quelque autre chose, l'impératif est hypothétique ; si elle est représentée comme bonne en soi, […] le principe qui la détermine est alors l'impératif catégorique. »

Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs (1785), Deuxième section

Un impératif hypothétique Un impératif catégorique
? ?
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? ?
  1. Un impératif inconditionné, qui ne dépend pas de nos désirs
  2. Formulation : « Si je veux B, je dois faire A »
  3. Il s'agit de faire preuve d'intégrité : il faut agir en cohérence avec nos devoirs moraux
  4. Formulation : « Je dois faire A » (un point c'est tout)
  5. Il s'agit d'être pragmatique : il faut choisir le moyen le plus adapté pour pouvoir réaliser nos désirs
  6. Un impératif conditionné qui dépend d'un désir préalable
Un impératif hypothétique Un impératif catégorique
6 Un impératif conditionné qui dépend d'un désir préalable 1 Un impératif inconditionné, qui ne dépend pas de nos désirs
2 Formulation :
« Si je veux BB,
je dois faire AA »
4 Formulation :
« Je dois faire AA »
(un point c'est tout)
5 Il s'agit d'être pragmatique : il faut choisir le moyen le plus adapté pour pouvoir réaliser nos désirs 3 Il s'agit de faire preuve d'intégrité : il faut agir en cohérence avec nos devoirs moraux

Schéma de la distinction entre agir par devoir et agir conformément au devoir

Quelques exemples d'actions qui semblent morales, mais qui sont guidées par l'intérêt :

  1. Être honnête pour garder ses clients
  2. Agir par crainte du regard d'autrui, agir par crainte de la sanction
  3. Agir par désir de reconnaissance sociale, agir pour avoir une bonne réputation
  4. Agir comme Valmont, dans Les liaisons dangereuses (lettres 21 et 22), qui se donne l'apparence de la vertu pour séduire une femme sensible aux actions morales.

2/ Kant : agir moralement, c'est agir d'après une règle universalisable

« Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu puisses vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle »

Kant, Fondements de la Métaphysique des mœurs (1785), Deuxième section

Schéma du test d'universalisation

Exemple 1 : le mensonge

Image de Pinocchio en train de mentir avec son nez qui a grandi

Exemple 2 : la tricherie à un examen

Image d'une tricherie à un examen

Exemple 3 : ne jamais aider les personnes dans le besoin

Image d'une main tendue vers une autre main

3/ Kant : agir moralement, c'est respecter la dignité des autres

« Le respect que je porte à autrui ou qu’il peut exiger de moi […] consiste à reconnaître la dignité des autres hommes, c’est-à-dire une valeur qui n’a pas de prix […]. Tout homme a le droit de prétendre au respect de ses semblables, et réciproquement il est obligé lui-même au respect à l’égard de chacun d’eux.
L’humanité est par elle-même une dignité : l’homme ne peut être traité par l’homme (soit par un autre, soit par lui-même) comme un simple moyen, mais il doit toujours être traité comme étant aussi une fin ; c’est précisément en cela que consiste sa dignité »

Kant, Métaphysique des mœurs, Doctrine de la vertu, Première partie, Livre second, Chapitre premier, §37-38

Un être humain doit être considéré comme … … et non pas
comme …
? ?
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  1. … une personne
  2. … un simple moyen, ou un simple obstacle
  3. … un sujet autonome qui a une valeur, une dignité
  4. … une “fin en soi”
  5. … une chose
  6. … un simple objet remplaçable par un autre (si le prix est équivalent), négligeable (si le prix est faible), ou qu'on a le droit d'utiliser (si on paie le prix)
Un être humain doit être considéré comme … … et non pas
comme …
1 … une personne 5 … une chose
4 … une
“fin en soi”
2 … un simple moyen, ou un simple obstacle
3 … un sujet autonome qui a une valeur,
une dignité
6 … un simple objet remplaçable par un autre (si le prix est équivalent), négligeable (si le prix est faible), ou qu'on a le droit d'utiliser (si on paie le prix)

Couverture du film Mesure d'urgence

Dans le film Mesure d'urgence, un médecin kidnappe des personnes sans abri afin de faire des expérimentations médicales sur eux, dans le but de trouver un remède contre des maladies pour le moment incurables. Il affirme que la vie de ces individus n'a pas beaucoup de sens : leur mort était de toute façon prévisible ; autant faire en sorte qu'elle soit utile ! Un grand médecin a, selon lui, le courage d'outrepasser les règles ordinaires : il serait légitime de sacrifier quelques vies sans significations, si cela permet d'améliorer de manière importante la vie d'un grand nombre de personnes.

Couverture du film Le Loup de Wall Street

Dans le film Le Loup de Wall-Street, Jordan Belfort, un trader, téléphone à des personnes peu aisées qui veulent placer leurs maigres économies, et leur ment sur la valeur des actions qu'il leur propose (« I was selling them shit »). Ces personnes ne sont pour lui qu'un simple moyen de gagner plus d'argent : il les méprise et les considére comme de vulgaires bouseux. Vers la fin du film, quand sa femme lui annonce qu'elle veut divorcer, il ne la voit plus que comme un obstacle entre lui et ses enfants qu'il veut garder avec lui. Il devient violent jusqu'à la frapper dans l'estomac.

Couverture du film Elephant Man

Dans le film Elephant Man, le chirurgien Frederick Treves découvre un homme complètement défiguré et difforme, devenu une attraction de foire : John Merrick, « le monstre », qui doit son nom d'Elephant Man au terrible accident que subit sa mère, renversée par un éléphant alors qu'elle était enceinte de quelques mois. Impressionné par de telles difformités, le Dr. Treves achète Merrick, l'arrachant ainsi à la violence de son propriétaire, et à l'humiliation quotidienne d'être mis en spectacle. Le chirurgien découvre rapidement en Merrick un homme meurtri, intelligent et doté d'une grande sensibilité, qui demande à être considéré comme un être humain.

4/ Quelques difficultés

Schéma de trois objections contre la morale kantienne

Exercice d'argumentation et de mobilisation de sa culture

  • Choisir un sujet et rédiger l'équivalent d'une sous-partie (250-350 mots), de préférence avec le modèle ARES :
    Attention : il faut développer une seule réponse avec un seul argument, et mobiliser ses connaissances (concept, référence, exemple) sur la morale kantienne
    • La conscience morale n’est-elle que le résultat de l’éducation ?
    • La morale peut-elle se passer d’un fondement religieux ?
    • Peut-on fonder la morale sur la recherche du bonheur ?
    • Faire son devoir, est-ce renoncer à sa liberté ?
    • En politique, a-t-on le droit de sacrifier la morale à l’efficacité ?
    • Respecter autrui, est-ce respecter sa différence ?