Le langage est‑il un simple moyen de communication ?

Cédric Eyssette
http://eyssette.github.io

  • Qu'est-ce que communiquer ?
  • Comment peut-on définir le langage ?

Dans toute communication, il y a production d'un signe qui transmet une information à un récepteur.
Au sens large, le langage désigne tout type de signes qui assure cette fonction, et, en ce sens, le langage se réduit à un simple moyen de communication.
Cependant, au sens strict, le langage désigne tout système de signes écrits, parlés ou gestuels utilisés par les êtres humains.

  • Au sens strict : le langage est-il un simple moyen de communication ?

1/ Première approche : comparaison entre communication humaine et communication animale

  • Comment les animaux communiquent-ils ? Pourquoi communiquent-ils ? Que communiquent-ils ?
  • Quelles différences y a-t-il entre la communication animale et la communication humaine ?

Oophaga pumilio ou grenouille des fraises

Dendrobates tinctorius

Pour approfondir :

  1. Sur les épaules de Darwin, “Chant et dialogues” 🔗
  2. Michel Kreutzer, Un demi-siècle de chants d'oiseaux 🔗
  3. Martine Hausberger, “L'apprentissage du chant chez l'oiseau : l'importance des influences sociales” 🔗

2/ Deuxième approche : les mots sont-ils importants ?

  • Pourquoi dit-on parfois que « ce ne sont pas les mots qui comptent » ?
  • Pourquoi dit-on parfois, au contraire, que « les mots sont importants » ?

Deux cas à examiner :

  • Quel effet peut avoir une insulte ?
  • Dans un entretien d'embauche ou dans un discours politique, pourquoi faut-il faire attention aux mots que l'on choisit ?

« Devenir gay, c'est devenir la cible, et s'apercevoir qu'on était potentiellement la cible avant même de le devenir réellement, et donc, avant même d'en avoir conscience, d'un vocable mille fois entendu et dont on connaît depuis toujours la force injurieuse. On est précédé par une identité stigmatisée que l'on vient à son tour habiter et incarner et avec laquelle il faut se débrouiller d'une manière ou d'une autre. […] Bientôt […] je devins le destinataire direct de l'insulte, puisque c'est à moi personnellement qu'elle s'adressa. Je fus environné par elle. Et plus encore : défini par elle. Elle m'accompagnait partout, pour me rappeler sans cesse que je contrevenais à la règle, à la norme, à la normalité. […] On m'exposait en place publique : « Voyez donc ce qu'il est, croit-il vraiment qu'il peut déjouer notre vigilance ? » […] Je suis un produit de l'injure. Un fils de la honte. […] Je pourrais écrire, en m'inspirant de la prose métaphorique et fleurie de Genet, qu'il arrive un moment où l'on transmue les crachats en rose, les attaques verbales en guirlande de fleurs, en rayons de lumière. Bref, un moment où la honte se transforme en orgueil. […] Il ne suffit [cependant] pas d'inverser le stigmate […] ou de se réapropprier l'injure et de la resignifier pour que leur force blessante disparaisse à tout jamais. On chemine toujours en équilibre incertain entre la signification blessante du mot d'injure et la réappropriation orgueilleuse de celui-ci. On n'est jamais libre, ou libéré. On s'émancipe plus ou moins du poids que l'ordre social et sa force assujettissante font peser sur tous et à chaque instant. »

Didier Eribon, Retour à Reims

« Le langage pourrait-il nous blesser si nous n'étions pas, en un sens, des êtres de langage, des êtres qui ont besoin du langage pour être ? Sommes-nous vulnérables parce que les termes du langage nous constituent ? […] Être insulté est l'une des premières formes de blessure linguistique dont nous avons l'expérience. Mais tous les noms que l'on nous donne ne sont pas injurieux. Recevoir un nom est aussi l'une des conditions de la constitution d'un sujet dans le langage […]. Le nom utilisé pour nous appeler ne nous fige pas purement et simplement. Recevoir un nom injurieux nous porte atteinte et nous humilie. Mais ce nom recèle par ailleurs une autre possibilité : recevoir un nom, c'est aussi recevoir la possibilité d'exister socialement. »

Judith Butler, Le Pouvoir des mots. Discours de haine et politique du performatif

Formulation du problème

Dans toute communication, il y a production d'un signe qui transmet une information à un récepteur. Au sens large, le langage désigne tout type de signes qui assure cette fonction, et, en ce sens, le langage se réduit à un simple moyen de communication. Cependant, au sens strict, le langage se rapporte à des systèmes de signes écrits, parlés ou gestuels. En ce sens strict, le langage n'est-il qu'un moyen de communication comme les autres ou bien y a-t-il des propriétés distinctives qui différencient le langage des autres moyens de communication ? Les signes qui constituent les langues humaines ne sont-ils pas plus complexes que les signes utilisés par les animaux ? Peut-on vraiment réduire le langage à un simple instrument de transmission d'informations, un simple outil au service de l'individu ?

I – Le langage n'est pas
un simple moyen de
communication :
La complexité du langage
le distingue des autres
moyens de communication

Première partie

A. Une structure complexe

1. Complexité des signes produits

a) Les phonèmes

Représentation schématique des zones articulatoires par Georges Straka

Tableau phonologique des consonnes du français, d'après Martin (1983), et des voyelles du français

b) Les morphèmes

  • “inacceptables”
  • “anticonstitutionnellement”
  • “Rindfleisch­etikettierungs­überwachungs­aufgaben­übertragungs­gesetz” : loi sur le transfert des obligations de surveillance de l'étiquetage de la viande bovine

Le cas des langues agglutinantes et des langues polysynthétiques

c) La syntaxe

d) Synthèse

Définition

  • Le principe d'exprimabilité correspond à l'idée qu'il n'y a pas de limites à ce que l'on peut exprimer par le langage, car on peut toujours enrichir son propos afin de préciser ce que l'on veut dire.

Une critique possible ?

  • N'y a-t-il pas des mots propres à certaines langues qui permettent mieux d'exprimer certaines idées, certains sentiments, et qui sont difficilement traduisibles dans notre langue ? 🔗

Défense du principe d'exprimabilité

On peut toujours trouver une périphrase qui exprime le sens de ce terme.

On perd bien sûr la force esthétique du mot, la densité de sens de l'expression originale, mais la signification ne semble pas perdue.

2. Complexité de l'interprétation des signes

a) La distinction : indices, icônes, symboles

Indices Icônes Symboles
Lien dans le réel lui‑même : lien causal, succession temporelle, contiguïté spatiale Lien de similarité, de ressemblance Lien conventionnel : “l'arbitraire du signe”

On peut utiliser cette distinction pour analyser différents types de signes.

  • Exemple : analyse de la gestuelle dans des clips vidéo de rap 🔗.
  • Examinons le cas du langage au sens strict : les mots sont-ils des indices, des icônes ou bien des symboles ?

Certains mots peuvent certes être analysés comme des indices, et il est possible de rechercher une dimension iconique dans certains usages notamment poétiques du langage.

On peut cependant affirmer que le langage repose essentiellement sur des symboles, qui supposent donc l'apprentissage d'un code complexe.

b) La nécessité de faire des inférences en fonction du contexte

La communication par le biais de signes linguistiques suppose elle aussi de nombreuses inférences : il ne suffit pas de connaître le sens des mots pour pouvoir comprendre l'implicite et décrypter l'intention du locuteur.

Quelques exemples :

  1. « Peux-tu me passer le sel ? »
  2. « Tu peux changer de disque ! »
  3. « J'ai un stylo. »
  4. « Monsieur Zieuvifs regardait tous ses élèves avec admiration et émotion. Ils étaient tous en tenue, avec leurs ceintures noires, marron ou orange et l’applaudissaient chaleureusement. »

B. Des fonctions complexes

1) Le langage n'est “pas un simple code de signaux” (Benveniste)

« Le message des abeilles n'appelle aucune réponse de l'entourage, sinon une certaine conduite, qui n'est pas une réponse. Cela signifie que les abeilles ne connaissent pas le dialogue, qui est la condition du langage humain. Nous parlons à d'autres qui parlent, telle est la réalité humaine. [...] Parce qu'il n'y a pas de dialogue pour les abeilles, la communication se réfère seulement à une certaine donnée objective. Il ne peut y avoir de communication relative à une donnée “linguistique” [...] L'abeille ne construit pas de message à partir d'un autre message. [...] L'ensemble de ces observations fait apparaître la différence essentielle entre les procédés de communication découverts chez les abeilles et notre langage. Cette différence se résume dans le terme qui nous semble le mieux approprié à définir le mode de communication employé par les abeilles ; ce n'est pas un langage, c'est un code de signaux. »

Benveniste, Problèmes de linguistique générale

2) Il y a une multiplicité de “jeux de langage” (Wittgenstein)

« Représentez-vous la multiplicité des jeux de langage au moyen des exemples suivants : Commander, et agir d'après des commandements. Décrire un objet d'après son aspect, ou d'après des mesures prises. Reconstituer un objet d'après une description (dessin). Rapporter un événement. Faire des conjectures au sujet d’un événement. Former une hypothèse et l’examiner. Représenter les résultats d’une expérimentation par des tables ou des diagrammes. Inventer une histoire; et lire. Jouer du théâtre. Chanter des “rondes”. Deviner des énigmes. Faire un mot d’esprit; raconter. Résoudre un problème d’arithmétique pratique. Traduire une langue dans une autre. Solliciter, remercier, maudire, saluer, prier. »

Wittgenstein, Investigations philosophiques

II – Le langage n'est pas
un simple moyen de
communication :
Le langage peut être un obstacle à la
communication, et les enjeux sociaux,
politiques et culturels
du langage
montrent qu'il n'est pas un simple instrument au service d'un individu

Deuxième partie

A. Le langage comme obstacle

Il y a deux raisons liées au langage pour lesquelles deux personnes peuvent ne pas parvenir à communiquer :

  1. Le problème peut se situer au niveau de la réception : comme le langage repose sur un code et sur un acte d'interprétation, La personne qui reçoit l'information n'a peut-être pas le même code que le locuteur, ou elle peut mal interpréter l'intention du locuteur ;
  2. Le problème peut se situer au niveau de la production : les mots semblent parfois insuffisants et ils ne permettent pas de dire tout ce que nous aimerions pouvoir dire.

« Nous ne voyons pas les choses mêmes ; nous nous bornons, le plus souvent, à lire des étiquettes collées sur elles. Cette tendance, issue du besoin, s'est encore accentuée sous l'influence du langage. Car les mots (à l'exception des noms propres) désignent des genres. Le mot, qui ne note de la chose que sa fonction la plus commune et son aspect banal, s'insinue entre elle et nous […]. Et ce ne sont pas seulement les objets extérieurs, ce sont aussi nos propres états d'âme qui se dérobent à nous […]. Ainsi, jusque dans notre propre individu, l'individualité nous échappe. Nous nous mouvons parmi des généralités et des symboles »

Bergson, Le rire

B. Les enjeux sociaux, politiques et culturels du langage

1) L'apport de la sociolinguistique

« La forme particulière que prend un rapport social conditionne le choix de ce qui est dit, du moment où c'est dit, et de la manière dont c'est dit. Elle règle les options que prennent les locuteurs aussi bien au niveau syntaxique que lexical. Par exemple, si un adulte parle à un enfant, il utilisera une forme de langage simple dans sa syntaxe, aussi bien que dans son vocabu­laire. En d'autres termes, la forme du rapport social se traduit souvent par certaines sélections syntaxiques et lexicales. […] Les formes différentes de rapports sociaux peuvent engendrer, par l'intermédiaire des procédés de construction verbale, des systèmes de discours ou des codes linguistiques tout à fait différents. […] Quand l'enfant apprend à parler, c'est-à-dire, dans notre vocabulaire, apprend les codes spécifiques qui règlent ses actes verbaux, il apprend les exigences de sa structure sociale. […] C'est essentiel­lement par l'effet du processus linguistique que la struc­ture sociale devient le substrat de son expérience. De ce point de vue, chaque occasion où l'enfant parle ou écoute contribue à lui faire intérioriser la structure sociale et à lui imposer son identité sociale. »

Basil Bernstein, Langage et classes sociales

2) Le langage est une partie et une condition de la culture

« [L]e langage se réalise toujours dans une langue, dans une structure linguistique définie et particulière, inséparable d'une société définie et particulière. Langue et société ne se conçoivent pas l'une sans l'autre. L'une et l'autre sont données. Mais aussi l'une et l'autre sont apprises par l'être humain, qui n'en possède pas la connaissance innée. L'enfant naît et se développe dans la société des hommes. Ce sont des humains adultes, ses parents, qui lui inculquent l'usage de la parole. L'acquisition du langage est une expérience qui va de pair chez l'enfant avec la formation du symbole et la construction de l'objet. Il apprend les choses par leur nom ; il découvre que tout a un nom et que d'apprendre les noms lui donne la disposition des choses. Mais il découvre aussi qu'il a lui-même un nom et que par là il communique avec son entourage. Ainsi s'éveille en lui la conscience du milieu social où il baigne et qui façonnera peu à peu son esprit par l'intermédiaire du langage »

Benveniste, Problèmes de linguistique générale

III – Le langage n'est pas
un simple moyen de
communication :
Le langage ne fait pas qu'exprimer
des pensées intérieures déjà
constituées, il joue un rôle dans la
formation même de nos pensées

Troisième partie

A. Examen de l'hypothèse du déterminisme linguistique

Définition

  • D'après le déterminisme linguistique (= hypothèse de Sapir-Whorf), la langue que nous utilisons pour penser a un effet sur notre manière de penser
  1. ❌ Ce n'est pas une thèse sur la nécessité du langage, en général, pour pouvoir penser
  2. ❌ Ce n'est pas une thèse sur l'effet de certaines paroles particulières (insultes, stéréotypes) sur notre esprit
  3. ✅ C'est l'idée que les caractéristiques particulières d'une langue (sa syntaxe, son lexique) ont un effet sur les manières de penser 🔗

Plusieurs points remettent en cause l'idée d'un déterminisme linguistique fort 🔗 :

  1. Les similarités dans le fonctionnement cognitif des êtres humains et l'absence de frontières absolues entre les langues ;
  2. La possibilité d'avoir certaines pensées sans avoir les mots correspondants ;
  3. La difficulté de distinguer les effets de la langue elle-même et les effets de la culture environnante.
  • Mais n'y a-t-il pas au moins une forme de déterminisme linguistique faible ?

B. Une pensée sans mots pour l'exprimer reste une pensée obscure : le langage rend possible une pensée claire et précise

« C'est dans les mots que nous pensons. Nous n'avons conscience de nos pensées déterminées et réelles que lors­que nous leur donnons [une] forme objective […] On croit ordinairement, il est vrai, que ce qu'il y a de plus haut, c'est l'ineffable. Mais c'est là une opinion superficielle et sans fondement ; car, en réalité, l'ineffable, c'est la pensée obscure, la pensée à l'état de fermentation, et qui ne devient claire que lorsqu'elle trouve le mot. Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus vraie. Sans doute on peut se perdre dans un flux de mots sans saisir la chose. Mais la faute en est à la pensée imparfaite, indéterminée et vide, elle n'en est pas au mot. […] Par conséquent, l'intelligence, en se remplissant de mots, se remplit aussi de la nature des choses. »

Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques, Philosophie de l'Esprit

Des enjeux sociaux et politiques

1/ Discours positif creux (« Ne rien dire »)

À vous de faire un discours : « Mesdames, messieurs …

À l'heure de la mondialisation … … notre mission est de savoir nous adapter aux transformations de notre société … … et je le dis en toute transparence : nous devons reconstruire le pacte républicain. »
Les attentes des Français sont claires … les réformes nécessaires doivent être mises en œuvre … … c'est pourquoi je m'engage à mettre en place un véritable plan d'action courageux et ambitieux. »
Dans un pays moderne comme la France … … l'État se doit d'agir en rupture avec les méthodes du passé … … je souhaite ainsi repenser les conditions d'un dialogue social juste. »
La démocratie, nous le savons, est en crise, … … notre responsabilité est grande et nous devons faire face aux enjeux de la conjoncture actuelle … … je crois que nous pouvons relever ensemble ce défi. »

2/ Euphémisation (« Ne pas dire »)

Novlangue Réalité masquée
« Les événements d'Algérie »
« Un plan social »
« Les collaborateurs »
« Un drame familial »
« Faire preuve de pédagogie » 🔗
« Le cinéaste franco-polonais est assigné en résidence en Suisse […] pour une affaire de moeurs qui remonte à plus de 30 ans » 🔗

3/ Effets de cadrage (« Dire d'une certaine manière »)

Novlangue Angle adopté
« Les charges sociales »
« La vidéoprotection »
« Prendre les français en otage » 🔗
« Les réformes nécessaires »
« Les émeutes urbaines »

// des signes mais qui ne sont pas produits intentionnellement

// des signes trompeurs (mais pas produits intentionnellement)

// signe non produit intentionnellement : les caractéristiques de la queue du paon (cf. la théorie du handicap) ; mais production intentionnel d'un signe : déploiement de la queue

// Intérêt de cet exemple : // apprentissage du chant : les interactions sociales sont essentielles à la constitution du répertoire des individus // fonctions plus complexes => reconnaissance sociale, fonction territoriale, sélection sexuelle, aspect hédonique // Reconnaissance // "Les processus cognitifs actuellement étudiés laissent supposer que, sur la base du modèle que lui offre son chant, un individu peut très bien appliquer des règles pour comparer mentalement les éléments sonores et les syntaxes qui se ressemblent ou qui sont différents. Ces processus cognitifs de catégorisation pourraient ainsi rendre compte du fait que les oiseaux réagissent avec plus ou moins d’intensité à des chants qu’ils n’ont cependant jamais chantés ni entendus. La proximité ou l’écart de ces chants par rapport à des prototypes seraient à la base de la reconnaissance" // Fonction territoriale : // "Les observations plus anciennes de Brémond sur le rouge-gorge (1967), puis celles de Falls sur des espèces nord-américaines (1985), avaient déjà indiqué que lorsqu’ils se répondent lors d’interactions vocales et de contestations territoriales, les mâles reprennent souvent le chant du congénère qu’ils viennent d’entendre, ou alors un chant ressemblant si leur répertoire n’en possède pas un identique. Cette « imitation contestatrice » (ou « song matching ») indique clairement au contestataire que c’est à lui qu’on s’adresse. " // "D’autres travaux plus récents ont exploré, en nature comme au laboratoire, l’intérêt que les oiseaux, mâles et femelles, portent à l’écoute des interactions vocales de mâles voisins. C’est ce qu’on a appelé, de manière aussi pertinente que pittoresque, « écouter aux portes ». Lors d’une interaction, il est fréquent de voir un mâle attendre que son voisin commence à chanter pour recouvrir la fin de ce chant par le sien propre. On a pu montrer qu’il s’agit là d’un acte agressif et de dominance (Amy & Leboucher, 2009). En effet, lorsque ce comportement se prolonge, l’agresseur ne tarde pas à envahir le territoire de son voisin, et dès lors, les autres mâles qui ont assisté à ces joutes ne se risqueront pas à y procéder à des incursions." // Sélection sexuelle // "Chez les canaris, il a été démontré (Vallet & Kreutzer, 1995) que les femelles témoignent d’une préférence marquée pour certaines séquences particulières du chant des mâles, celles qui sont les plus difficiles à produire par la syrinx parce qu’elles nécessitent une prompte coordination des bronches droite et gauche pour produire des glissandi qui sont répétés à des tempi très rapides sur de larges bandes de fréquences, du plus aigu au plus grave" Mais : "les femelles sont réellement pragmatiques. Nous avons par exemple apporté la démonstration que des femelles canaris peuvent modifier l’intensité des réponses qu’elles accordent aux chants (Nagle & Kreutzer, 1997), surtout quand il s’agit de partenaires avec lesquels elles se sont accouplées (Béguin et al., 1998). Les échecs reproducteurs rendent ces chants moins attractifs. " // Aspect hédonique, fonction esthétique // "On a montré qu’il existe dans le cerveau des animaux des « circuits de récompense » qui sont activés en présence de certains événements sociaux, comme le choix de partenaires (Aragona et al. 2003) ou la production de chants chez l’oiseau (Hara et al., 2007). Lorsque les animaux produisent, voient ou entendent certains comportements, leurs systèmes de récompense sont donc susceptibles d’être stimulés. La vie sociale s’accompagne pour l’animal de rencontres plus ou moins plaisantes, et la présence de tel individu plutôt que celle de tel autre va lui apporter plus ou moins de satisfactions." // "En outre, si l’on connaît bien chez l’humain les effets de tension et de relaxation que la succession des phrases musicales exerce sur celui qui écoute, il est légitime de postuler l’existence d’un phénomène comparable chez les oiseaux. […] En l’occurrence, les duos de chants ont beaucoup à nous apprendre, et l’étude de ces interactions d’un point de vue musical se révélerait sans aucun doute fort riche d’enseignements. Après cinquante ans de recherches essentiellement utilitaires, cette approche esthétique permettrait à l’éthologie de restituer aux oiseaux cette capacité « hédonique » qu’ils partagent avec les humains : s’enchanter en communiquant" // Chant des oiseaux pas organisé comme un langage : ("en intervenant soit sur la syntaxe soit sur la phonologie d’un chant, on a pu vérifier que des types de syllabes et des combinatoires ne confèrent pas un sens particulier à un passage de ce chant. En effet, si l’on modifie l’ordre de ces syllabes ou leur forme, voire si on les dispose dans un complet désordre, on n’aboutit au mieux qu’à diminuer l’intensité des réponses, sans altérer pour autant le sens général du signal" ; "Les oiseaux sont effectivement des stratèges de la reconnaissance acoustique de leurs congénères. Si on détruit expérimentalement la syntaxe de leurs chants, ils reportent leur attention sur la phonologie ; si on détruit la phonologie, ils reportent leur attention sur la syntaxe " ; L’important pour eux consiste à identifier la présence d’un compétiteur, quelles que soient les conditions de l’environnement physique et social. Or, dans une communication à distance, la redondance des signaux se révèle plus utile qu’un déclencheur, qui n’offre d’efficacité qu’en proximité.)

// Struhsaker, T. T. 1967a. Auditory communication among vervet monkeys (Cercopithecus aethiops) // https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0003347280800972 // https://www.youtube.com/watch?v=q8ZG8Dpc8mM

// https://thehumanevolutionblog.com/2015/07/28/koko-washoe-and-kanzi-three-apes-with-human-vocabulary/ // https://slate.com/technology/2014/08/koko-kanzi-and-ape-language-research-criticism-of-working-conditions-and-animal-care.html // https://en.wikipedia.org/wiki/Clever_Hans

// https://docs.google.com/document/d/112nV1RVZFNQ6TuO-JRgI9LCED0B6eU8AZsEDMbH_klQ/edit

// paroles ≠ actes ; parole = bavardage, parler pour ne rien dire ; paroles ≠ expression véritable de nos intentions

// // [P // [GN // [Dét L'] // [N enfant] // ] // [GV // [V joue] // [GP // [P à] // [GN // [Dét la] // [N balle] // ] // ] // ] // [GP // [P dans] // [GN // [Dét le] // [N jardin] // ] // ] // ] // https://ironcreek.net/syntaxtree/ // https://yohasebe.com/rsyntaxtree/ // http://mshang.ca/syntree/ //

// – Y a-t-il des indices dans le langage ? Cf. les indexicaux … // – Part du symbolique dans les icônes // Y a-t-il une dimension iconique dans les mots ? (pouvoir d'évocation des sons ? cf. en poésie ; cf. takata/milimi ; cf. Mallarmé sur "jour" et "nuit" ; cf. cratylisme)

// https://www.futura-sciences.com/planete/dossiers/zoologie-animaux-ont-ils-culture-1525/page/6/ // Honey bee societies and dance floor democracy | Margaret Couvillon | TEDxHousesofParliament : https://www.youtube.com/watch?v=tcXkQBY0i0k // Dancing bees cast their votes on the best land-types and areas for their food collection https://www.youtube.com/watch?v=AMU1KOF_Tck

// Reprendre l'analyse de la danse des abeilles

// + cas du chant des oiseaux : dialogue ?

// diversité des langues (Tour de Babel / malgré les tentatives : anglais, latin, esperanto ; apprentissage d'une langue étrangère ; sourd : langue des signes) // diversité des usages selon le groupe social : différentes régions, classes sociales, générations, métiers

// Les mots ne sont pas faits pour la description, la pensée, la contemplation, mais pour l'action, l'utilité // abstrait / concret // général / singulier // simplification / complexité, richesse, finesse, nuances

// Faire schéma Bergson : Le langage d'après Bergson // Un ensemble d'étiquettes // générales : valent pour plusieurs choses, situations, personnes => suppriment la singularité du réel // abstraites : ne retiennent du réel qu'un aspect => suppriment les nuances et la richesse du réel

Distinction : langage / langue / parole Documentaire : Les Roses Noires https://www.youtube.com/watch?v=YJegnWsbMSo

// La question est la suivante : // - La langue que nous utilisons pour penser a-t-elle un effet sur notre manière de penser ?

// Une grande partie de nos pensées sont verbales : nous utilisons des mots pour penser, nous formons des idées qui peuvent s'exprimer sous la forme de phrases. // Or : nous avons appris une langue particulière. La question est donc la suivante : // Les caractéristiques syntaxiques et morphologiques d'une langue particulière nous font-ils penser d'une certaine manière ?

// Travaux contemporains sur les aphasiques et sur la cognition animale

// cf. travaux sur la menace du stéréotype : même activité présentée comme un "dessin" ou comme des "maths"

// http://htl.linguist.univ-paris-diderot.fr/_media/fortis/relativisme_2012_long-1.pdf

// https://plato.stanford.edu/entries/culture-cogsci/#Lan // - https://plato.stanford.edu/entries/linguistics/#Who // - https://www.philo52.com/articles.php?lng=fr&pg=2032 // - https://www.ted.com/talks/lera_boroditsky_how_language_shapes_the_way_we_think/transcript?language=fr#t-180267 // Dehaene : https://www.college-de-france.fr/site/stanislas-dehaene/course-2020-09-15-09h30.htm

// Cas de l'arithmétique : Pirahã // https://www.sciencesetavenir.fr/fondamental/que-sont-les-nombres-sans-les-mots_22679

// Nous pouvons avoir l'impression que nous avons une intuition riche que nous ne parvenons pas à formuler. // Mais cette incapacité n'est que le signe d'une pensée en train de se construire. // C'est avec les mots que la pensée devient riche et précise.

// 1er extrait : distinguer possibilité légale/morale (question de la liberté d'expression et de la censure) et capacité réelle (niveau propre à la novlangue). // 2e extrait : contrôler la langue -> contrôler la pensée -> empêcher la possibilité même d'une critique sociale et politique

// Des termes qui véhiculent une grille de lecture particulière, qui cadrent, orientent la discussion, qui empêchent le débat